Pour l’inauguration des Fenetres qui parlent 2017

Attention, j’initie une allocution !
Chers citoyennes et chers citoyens d’ici, adultes ou jeunes, ancêtres centenaires, adolescents ou nourrissons, chers élus, chers délégués du conseil de quartier et des autres instances de consultation, chers adhérents aux intéressantes associations locales dont l’ardeur et le caractère industrieux ont des conséquences très heureuses sur le quotidien des chaleureux autochtones.
J’adresse de cordiales salutations à tous et à toutes. Je suis heureux d’être ici aux côtés d’un tas de gens très intéressants et je suis content de discourir sur ce qui nous réunit aujourd’hui, c’est-à-dire sur ce qui nous donne de l’allégresse. Car l’allégresse est nécessaire quand on réalise des choses dans ce quartier cher à notre cœur, ce quartier lillois doté d’une histoire centenaire et sans doute au-delà. Inaugurons donc de concert cette dernière édition des « Lucarnes qui causent ». Il est entendu que quand je dis dernière édition, c’est dans l’ordre chronologique, car il est quasi-certain qu’il y en aura d’autres, n’ayez crainte !
Je sens une sorte d’interrogation dans l’assistance. Certes, lorsque j’ai écrit l’introduction de ce discours, le slogan des Lucarnes qui causent laissait entendre que je ne serais guère hors-sujet en interdisant aux deux organes qui sont ici et là de se toucher tout en causant. C’était une idée géniale, hélas, hélas… J’ai déchanté. Car la sentence initiale, le sujet de cette rencontre artistique entre créateurs et indigènes a été changé en cours de route en raison d’une tragique succession d’incidents.

En effet le thème initial devait être « frottements ». Et je me suis dit, tiens on va pondre une bafouille sans frottements, c’est-à-dire uniquement constituée de mots, de vocables qui permettent aux lèvres une relative immobilité, au contraire de ce qui se passe en ce moment-même.
Et puis, ce thème du frottement ayant visiblement inspiré les artistes dans un sens peu compatible avec une monstration adaptée à tous les publics, nous avons d’un commun accord décidé de changer le thème de « frottements » en « flottements ». C’est donc pour cette raison que j’ai changé mon fuseau des piles, mon fusil d’épaule, décidé de vous gratifier aujourd’hui d’un discours fleuve en quatre parties argumentées de façon aussi pertinente que possible au moyen d’exemples précis tirés d’une abondante littérature scientifique riche en références bibliographiques de façon à ne laisser au doute qu’une place congrue, je dirais mieux dont voici l’introduction

… Vous le sentez le flottement, là ? Alors j’ai rempli ma mission, c’est-à-dire instiller un sentiment d’ennui sinon de malaise dans l’assistance. Car vous savez que pour flotter, une bouée de sauvetage doit être gonflée. Eh bien vous c’est pareil : c’est en vous gonflant que j’espère vous faire flotter. Mais en vous gonflant d’espérance. En vous gonflant d’orgueil. Et même peut-être en vous gonflant au pruneaux, voire en vous gonflant Sainte-Honorine. Mais je m’égare, il faut savoir terminer un discours, et puisque nous flottons de conserve dans le même bateau, j’aimerais toucher terre avec vous, et pour toucher terre, rien de tel que de tous se relier à la terre au moyen de ce câble électrique , et nous donnant tous la main ce qui permettra de traduire dans nos corps et dans nos chairs ce qui n’est autre que le but poursuivi par les fenêtres qui parlent, attention si vous portez un pacemaker, à savoir relier les gens les uns aux autres en court-circuitant les réseaux de l’art officiel, afin de leur permettre de vivre un choc esthétique et convivial à la fois.
À propos de la prise de terre, un célèbre maréchal peu connu pour sa promotion du vivre-ensemble disait « La terre ne ment pas »… Mais si la terre ne ment pas, est-ce que la flotte ment ?

Il est temps de remercier toutes les personnes qui ont donné de leur temps et de leur énergie dans l’organisation des Fenêtres qui parlent cette année, je sais qu’elles ne font pas cela pour la gloire, contrairement à moi qui n’ai pratiquement rien fait et qui espère fermement obtenir ma statue équestre place St Charles, j’ai nommé Christelle, Yasmine, Frédérique, Farah, Simon, Sophie, Barbara, Cécile, Mathilde, Marius, les écoles du quartier, le CABB, la Goélette et bien sûr tous les artistes et tous les habitants sans lesquels nous serions actuellement en train de regarder Cyril Hanouna tout en faisant décongeler un pavé de saumon à l’oseille de chez Picard.